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Écrit le 22/02/2023

Transaction / Location : Les apports de la loi climat & résilience – par Mr Cyril SABATIE

 

Quelles conséquences directes pour les professionnels de la transaction et de la location immobilière ?

Finalité d’un processus démarré il y a deux ans avec la mise en place de la Convention citoyenne pour le climat, la loi dite Climat et résilience (loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets) a été promulguée et publiée au Journal Officiel le 24 août 2021 (après validation par le Conseil constitutionnel dans une décision n° 2021-825 DC du 13 août 2021).

Cette loi contient pas moins de 305 articles (moins de 70 initialement…) et nécessitera, selon le Ministère de la transition écologique, plus d’une centaine de textes d’application pour permettre la mise en œuvre de l’ensemble de ces mesures, dont certaines entrent en vigueur selon un calendrier progressif. A l’exception de ces mesures qui nécessitent soit un texte réglementaire, soit entrent en vigueur de manière différée, les dispositions de la loi sont effectives depuis le 25 août dernier.

Certaines de ces dispositions impactent directement les activités et missions des professionnels de la loi Hoguet, qu’ils soient syndics, administrateurs de biens ou transactionnaires ; alors même que ceux-ci n’ont pas encore forcément digéré les mesures de la loi ELAN du 23 novembre 2018 et de ses textes subséquents…

Le titre V de la loi (articles 148 à 251) s’intitule d’ailleurs SE LOGER, mais ce n’est pas le seul à introduire des mesures affectant les activités immobilières et le secteur de la construction.

Petit inventaire pour La Boite Immo de ces mesures concernant les transactions et locations immobilières.

Le carnet d’information du logement (CIL)

Le retour d’un carnet d’information du logement à compter du 1er janvier 2023 (Article 167). Ce texte ressuscite en quelque sorte le carnet numérique du logement en introduisant de nouvelles dispositions dans le code de la construction et de l’habitation (articles L. 126-35-2 et suivants). Afin de faciliter et d’accompagner les travaux d’amélioration de la performance énergétique du logement ainsi que l’installation d’équipements de contrôle et de gestion active de l’énergie, ce carnet d’information du logement (très complet) est établi lors de la construction d’un logement, au sens de l’alinéa 8° de l’article L. 111-1 du CCH, ou à l’occasion de la réalisation de travaux de rénovation d’un logement existant ayant une incidence significative sur sa performance énergétique.

L’article L. 126-35-10 du CCH prévoit d’ailleurs que ce carnet d’information doit être transmis à l’acquéreur lors de toute mutation du logement tel qu’il est au moment de la mutation. Cette transmission doit avoir lieu au plus tard à la date de la signature de l’acte authentique. L’acquéreur devra en attester expressément dans l’acte authentique.

L’Audit énergétique

La loi réduit le périmètre de l’audit énergétique en cas de vente d’un logement énergivore. L’audit énergétique, obligatoire depuis le 1er juillet 2021 pour la vente des logements énergivores, est circonscrit (Article 158) aux maisons individuelles ainsi qu’aux immeubles et logements non soumis au régime de la copropriété appartenant aux classes D, E, F et G du DPE. La mise en location est désormais exclue de cette obligation d’audit préalable. Le texte précise que l’audit doit être remis par le vendeur ou son représentant (l’agence notamment) à l’acquéreur potentiel dès la première visite de l’immeuble ou de la partie d’immeuble faisant l’objet d’un tel audit (tout comme l’état des risques désormais). La remise peut être faite par tout moyen, y compris par voie électronique.

L’entrée en vigueur de cette obligation est échelonnée selon la classification énergétique du logement :

Au 1er janvier 2022, pour les logements qui appartiennent à la classe F ou à la classe G (et 2024 outre-mer) ;
Au 1er janvier 2025, pour les logements qui appartiennent à la classe E (et 2028 outre-mer) ;
Au 1er janvier 2034, pour les logements qui appartiennent à la classe D (idem outre-mer).

Précisons que cet audit énergique vient s’ajouter au contenu du dossier de diagnostic technique (DDT) fourni par l’acquéreur au vendeur, tout comme l’ERNT.

Le DPE locatif

Certaines dispositions du code de la construction et de l’habitation sont mises à jour et en cohérence consécutivement à la réforme du DPE et notamment en suite de son caractère opposable résultant de la loi ELAN de 2018 (article 179). L’article L. 126-29 du CCH est notamment corrigé pour confirmer le caractère opposable du DPE au bénéfice du locataire (Article 175). Le contenu du DPE est également complété. Celui-ci doit désormais préciser la quantité d’énergie issue de sources d’énergies renouvelables ou encore une information sur les conditions d’aération et de ventilation du logement. Il devra d’ailleurs être transmis à l’ADEME par le diagnostiqueur.

Enfin, l’article L.126-33 du même code est complété pour étendre les amendes administratives (3000€ maximum) aux non-professionnels que ne mentionneraient pas les informations obligatoires relatives au DPE dans les annonces de vente ou de location (Article 154).

La Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature recommande toutefois de suspendre pour le moment l’édition des DPE des logements construits avant 1975. En effet, depuis le 1er juillet 2021, le nouveau Diagnostic de performance énergétique (DPE) intégrant une nouvelle méthode de calcul est entré en vigueur. À la suite de remontées de terrain, des résultats anormaux ont été détectés sur les étiquettes du DPE pour certains types de logements, parmi ceux construits avant 1975. Le ministère du Logement réunira le 4 octobre 2021 les diagnostiqueurs, les agences immobilières et les éditeurs de logiciels. Un bilan complet des DPE réalisés depuis le 1er juillet sera présenté, détaillant les anomalies constatées et précisant les mesures correctrices qui seront intégrées dans le nouveau DPE.

La question de l’opposabilité de ces DPE reste entière (tout comme celle concernant les DPE dressés en 2012) !

Décence énergétique

L’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 sur les obligations du bailleur est modifié(Article 160). Ainsi à compter du 1er janvier 2025 les logements situés en métropole seront considérés comme énergétiquement décents entre la classe A et la classe F (2028 pour l’outre-mer). Puis à compter du 1er janvier 2028, entre la classe A et la classe E (2031 pour l’outre-mer). Enfin à compter du 1er janvier 2034, seront seulement considérés comme décents les logements situés entre la classe A et la classe D, y compris dans les territoires ultra-marins. En l’absence de décence énergétique, la location de ces logements ne pourra pas avoir lieu.

Permis de louer

Le permis de louer, institué dans certaines zones (selon l’article L.635-3 alinéa 2 du CCH), est étendu aux logements qui ne respectent pas les caractéristiques de décence, et donc désormais celles évoquées ci-avant liées à la performance énergétique du logement (Article 162 2°).

Notons qu’à cette occasion les organisations professionnelles ont tenté une nouvelle fois, en vain, de faire exclure du permis de louer les biens gérés par les professionnels de la loi Hoguet.

L’état des risques naturels

Ainsi, l’article L.125-5 du code de l’environnement sur l’état des risques naturels et technologiques (ERNT) est considérablement amendé (Article 256). Le texte précise désormais que toute annonce, quel que soit son support de diffusion, relative à la vente d’un bien immobilier devant faire l’objet d’un état des risques comprend une mention précisant le moyen d’accéder à ces informations. En cas de mise en vente de tout ou partie d’un immeuble, l’état des risques est remis au potentiel acquéreur par le vendeur dès la première visite, si une visite a lieu. Le texte ne précise pas si la visite virtuelle (très en vogue désormais) est concernée par cette obligation.

De plus, lorsque l’état des risques n’est pas remis à l’acquéreur au plus tard à la date de signature de la promesse de vente ou du contrat préliminaire (en VEFA), le délai de rétractation prévu à l’article L. 271-1 du CCH (dit SRU dans le jargon de la profession) ne court qu’à compter du lendemain de la communication de ce document à l’acquéreur. De même lorsque l’acte authentique de vente n’est pas précédé d’une promesse de vente ou d’un contrat préliminaire et que l’état des risques n’est pas joint à l’acte authentique de vente, le délai de réflexion mentionné au même article L. 271-1 ne court également qu’à compter du lendemain de la communication de ce document à l’acquéreur.

Enfin, l’ERNT doit désormais également comporter l’information selon laquelle l’immeuble bâti a subi un sinistre catastrophe naturelle ou technologique ayant donné lieu au versement d’une indemnité d’assurance. L’article L.125-5 imposait déjà cette obligation, mais elle n’était mentionnée que dans le bail ou l’acte de vente et non dans le contenu de l’ERNT.

Le Plan Pluriannuel de Travaux (PPT)

La loi Climat signe ainsi le retour du PPT (plan pluriannuel de travaux) dans l’article 14-2 de la loi du 10 juillet 1965 (Article 171). Ainsi, à l’expiration d’un délai de quinze ans à compter de la date de réception des travaux de construction de l’immeuble, un projet de plan pluriannuel de travaux doit être élaboré dans les immeubles à destination partielle ou totale d’habitation (sont donc exclues les copropriétés tertiaires).

Ce PPT doit être actualisé tous les dix ans. Les informations qu’il contient concernant le bâti de l’immeuble doivent d’ailleurs être mentionnées dans le registre d’immatriculation des copropriétés (géré par l’Anah).

Sans rentrer dans les détails pratiques de cette mesure qui intéresse plus directement les syndics, précisons que  le plan pluriannuel de travaux (PPT), ou le projet si celui-ci n’a pas encore été adopté par l’assemblée des copropriétaires, intègre la liste des documents remis à l’acheteur et prévus par le code de la construction et de l’habitation pour faire courir le délai de rétractation (article L.721-2 du CCH II 6°).

Annonces de location

Respectant un parallélisme des formes avec la vente immobilière, désormais toute annonce, quel que soit son support de diffusion, relative à la location d’un bien immobilier (d’habitation ou commercial) devant faire l’objet d’un ERNT comprend une mention précisant le moyen d’accéder à ces informations. En cas de mise en location de tout ou partie d’un immeuble, l’état des risques est remis au potentiel locataire par le bailleur (ou son mandataire même si le texte ne le précise pas) dès la première visite, si une visite a lieu.

La loi Climat a ainsi directement modifié la loi du 6 juillet 1989, et notamment son article 3-3. S’agissant de l’ERNT, le texte précise que l’état des risques doit être annexé au bail et que « En l’absence de ce document, le locataire peut poursuivre la résolution du contrat ou demander au juge une diminution du prix. » (Article 158 in fine).

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